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ETUDES CAMEROUNAISES
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24 août 2008

LES BAMILEKE, ET ENCORE LES BAMILEKE

"Le tribalisme n'existe pas, mais il tue. Plus il est dépourvu de fondements, plus il se fait virulent et se déchaîne."

Eboussi Boulaga. Lignes de résistance, Clé, 1999.

Il est difficile de faire croire que la situation actuelle du Cameroun est le seul fait d'une tribu. La destruction systématique des instruments de développement du Cameroun durant les 27 dernières années est à mettre sur le compte d'une clique au pouvoir. Le principal responsable, Paul Biya, à la tête du pays, est issu du Sud-Cameroun. Les membres les plus influents, dans le Nord comme dans le Sud du parti-Etat RDPC ne sont pas tous des Boulou ou des Beti? La paupérisation actuelle épargne-t-elle la province d'origine du chef de l'Etat? Les Boulou qui bombaient le torse au début des années 1980, affirmant haut et fort leur pouvoir, ont-ils aujourd'hui le retour attendu. Le livre "scandale" de Ateba Eyené pose les premiers points d'interrogation. Pourtant, ces même Boulou n'évitent pas le piège du Bouc émissaire. Ils considèrent toujours qu'ils sont victime des Bamiléké, même quand ils ont l'illusion de contrôler les rênes du pouvoir politique. En 1956 à Ebolowa et Sangmelima, en 1966 à Tombel, 1992 dans l'ensemble du Sud, pour ne citer que les points reconnus par l'histoire. Nous ne citerons par les appels au meurtre des présidents de Football après des matches de Football perdus dans la province de l'Ouest Bamiléké. Dire que le gouvernement de Paul Biya, compte en son sein, un homme nommé Mama Fouda, ministre de la santé, chef de file de l'épuration ethnique dans le Mfoundi, est déjà donner une meilleure qualification de la situation du Cameroun. Mais une question reste entière. Pourquoi toujours les Bamiléké? Ces derniers sont-ils des étrangers? Ils comptent pourtant des ministres influents dans le gouvernement de Paul Biya. A cette question, Puis Njawé ne répond pas. Il a la pudeur de croire que la dénonciation des incongruités d'un régime en perdition amène à prévenir des tragédies. Merci pour son courage.

N.T

A LA CROISEE DES MACHETTES...

Puis N. Njawé

A la fin de la première tournée qu’effectua Paul Biya en tant que chef d’Etat dans les dix provinces camerounaises en mai 1983, l’élite du Mfoundi, alors menée par Emah Basile, n’avait trouvé rien de mieux à offrir au nouveau président en tournée dans leur village, qu’une machette et un chasse-mouche. C’était le 11 juin 1983 devant le gratin politique, administratif, diplomatique et traditionnel réuni à l’esplanade de l’hôtel de ville de Yaoundé à l’occasion de la dernière étape de cette tournée. Geste hautement significatif dans le contexte politique de l’époque, marqué par le bicéphalisme entretenu par Ahidjo à la tête de l’Etat, et plaçant pratiquement sur le pied de guerre les originaires du Grand sud, fortement mobilisés pour défendre ce qu’ils considéraient alors comme « leur pouvoir ». A quoi l’illustre hôte aura cette réponse malheureuse : « Je saurai m’en servir », empruntant même au chef de guerre israélien cette explication devenue consacrée : « Qui veut la paix prépare la guerre ».

Neuf ans plus tard, à l’occasion de l’élection présidentielle de 1992, commença à Ebolowa la chasse aux « allogènes ». Armés de machettes et autres armes blanches, les populations autochtones entreprirent de casser, de piller et d’incendier les biens des « Anglos-bamis » soupçonnés d’intelligence avec le SDF de Ni John Fru Ndi et l’Union pour le changement, qui avaient proclamé le leader charismatique vainqueur de ladite élection présidentielle devant Biya. Le mouvement s’intensifia, contraignant certains membres des communautés grassfields de la région à plier bagages, et touchant même certains quartiers périphériques de Yaoundé. Un illustre ministre de la République monta alors au créneau et déclara à la Crtv que le gouvernement encourageait les citoyens de Yaoundé de s’armer de machettes pour parer à d’éventuelles attaques, ajoutant même que jamais le marché de la machette ne s’était bien porté que depuis que cet appel avait été lancé. Faut-il le rappeler, cette dérive faisait suite à un autre appel insistant lancé et réitéré chaque matin sur les ondes de Radio Centre, la station provinciale de la Crtv, invitant les populations à barrer la voie aux « étrangers » qui voulaient les spolier de leur « pouvoir ». Une véritable « radio mille collines » à la camerounaise, en fait !

La fameuse « Déclaration des forces vives du Mfoundi » rendue publique lors des émeutes de février 2008, de même que celle des chefs sawa datant de la même époque, s’inscrivent dans cette logique tribale ici encouragée par le pouvoir comme stratégie politique. Où des dignitaires et autres hauts cadres de la République prônent la loi du Talion, promettant de « répondre désormais aux coups par coups », non sans inviter « fermement tous les prédateurs venus d’ailleurs, de quitter rapidement et définitivement (leur) sol, car ils n’y seront plus jamais en sécurité… ». Que de tels propos soient tenus dans un pays où l’on se dit émancipé et où l’on dit construire une nation est inimaginable, déjà. Mais qu’aucune sanction ou tout au moins des mesures disciplinaires ne soient prises à l’encontre des auteurs est tout à fait inadmissible. Comment en effet des gens qui appellent à la haine tribale contre des compatriotes qui n’ont pas choisi de naître dans telle région ou telle autre, peuvent-ils bénéficier d’une telle impunité tant de l’autorité de l’Etat que de la société toute entière ?

Comment dès lors s’étonner que des supporters décident de s’attaquer à de paisibles citoyens parce que leur club de football aurait été victime d’injustice de la part des instances dirigeantes de la FecafootFecafoot dont ceux-ci ne sont même pas membres ? Ce qui s’est passé à AkonolingaAkonolinga mercredi dernier est la conséquence logique de toute la préparation psychologique décrite ci-dessus, et constitue à notre sens une interpellation forte à l’endroit des pouvoirs publics ainsi mis devant leurs responsabilités. Il faut que, pour une fois, des sanctions exemplaires soient infligées aux coupables des actes criminels enregistrés dans cette localité, dont l’assassinat d’un « commerçant » qui a reçu un coup de … machette (certains parlent de hache) sur le crâne, l’incendie de plusieurs maisons et commerces appartenant à des gens bien ciblés, et dont le seul crime est d’être originaires de l’Ouest. Pourquoi donc les adeptes de la machette ne vont-ils pas exercer leur art à Bakassi où la rébellion met désormais en déroute une armée camerounaise qui a plus que besoin de rescousse, ainsi que le démontre dans la présente édition de votre journal une interview exclusive que celui qui se présente comme l’un des chefs de cette rébellion a bien voulu nous accorder ?

Nous voici donc à la croisée des machettes. Et l’Etat doit prendre ses responsabilités, disons-nous, afin que force reste à la loi. Ne l’oublions pas : le génocide rwandais avait commencé comme cela, comme un jeu, et le commerce des machettes devint un des plus florissants… Avis donc à cette élite-là qui produit des discours pouvant conduire à la dérive, aux autorités qui laissent faire, aux hommes politiques qui ne jouent pas franc jeu, et surtout, à la justice qui devrait plus que jamais être vigilante.

Le messager Le 21-07-2008

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Commentaires
A
Le commentaire est incisif. Peut-on conprendre que la dégradation de la situation dans un pays est seulement perçue par une poignée d'individus. Les Camerounais du Nord au Sud ont mal du régime prédateur de Monsieur Biya. Qu'ils soient Ba ceci ou Ba cela, immigrés stratégiques ou résistants de terrain, les camerounais sont collectivement victimes de la mauvaise gestion et du manque de visibilité politique. Que certains hommes politique veulent prêcher le village pour noyer le poisson n'est que très normale dans toutes les dictatures.
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